Budget : Inception européen

Dés le départ, Paris, tout comme Rome d’ailleurs, qui a aussi dû consentir à des efforts supplémentaires, savait que son budget était totalement hors des clous, avec un déficit public prévu de 4,3 % du PIB, loin, très loin des 3 % promis pour 2015. Mais, elle espérait passer en force, pariant sur la répugnance de la Commission à sanctionner la seconde économie de la zone euro alors que la conjoncture se dégrade à vue d’oeil. L’exécutif communautaire n’a d’ailleurs pas fait mystère qu’il voulait éviter de « rejeter » le budget français, au risque de provoquer une crise majeure alors qu’elle exerce pour la première fois les nouveaux pouvoirs budgétaires que lui ont conférés les États membres. Manuel Valls, le Premier ministre français, triomphe donc sans risque : « tout le monde attendait la sanction de la France, l’humiliation, Canossa…. Rien de tout cela n’est arrivé », a-t-il clamé hier. Il aurait pu ajouter : « comme prévu ».

Mais la Commission savait aussi que sa crédibilité se jouait dans cette affaire, d’autant qu’elle n’est pas seule à décider : l’Eurogroupe, qui réunit les ministres des Finances de la zone euro, devra valider son analyse et ses propositions. Et au sein de cette enceinte, il y a un pays qui pèse plus que tous les autres réunis, l’Allemagne, qui n’aime pas qu’on transige avec les règles. « Berlin et le commissaire actuel aux affaires économiques et financières, Jyrki Katainen, voulaient des coupes supplémentaires », affirme un haut fonctionnaire européen. Paris devait donc faire un effort, même si cet effort était cosmétique, ce que la France a longtemps refusé de faire : « heureusement, entre les souverainistes de Bercy et les communautaires de l’Élysée et de Matignon, ce sont ces derniers qui ont gagné », se réjouit-on à Bruxelles. Mais on n’est pas dupe des « sacrifices » consentis : « la France a bénéficié de circonstances favorables, comme la baisse des taux d’intérêt et de sa contribution au budget de l’Union, et a joué sur la méthodologie. Il n’y a aucune coupe supplémentaire dans les dépenses publiques ».

Néanmoins, le message est passé, notamment auprès des opinions publiques : les États de la zone euro partagent désormais leur souveraineté budgétaire et il n’est plus question de faire n’importe quoi. La tendance, c’est la diminution des déficits et de la dette. Mais le gouvernement français n’a pas tout perdu dans l’affaire, loin de là : le fétichisme des chiffres en a pris un sérieux coup, ceux-ci pouvant être allègrement manipulés comme il l’a démontré. Surtout, l’Allemagne a pris conscience de son isolement : en dehors d’elle, plus personne ne considère l’équilibre budgétaire comme une fin en soi. Avoir des finances publiques en bon ordre, mais une croissance nulle et un chômage de masse, voilà le plus sûr moyen de tuer le projet européen. La Commission présidée par Jean-Claude Juncker le sait, c’est ce qui explique sa magnanimité à l’égard de la France.

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