Le retour de Nicolas Sarkozy est-il le futur cauchemar des socialistes?

Nicolas Sarkozy réussira-t-il son « come-back » ? Pas sûr mais il a un double avantage sur les autres : l’expérience, et sa capacité à mener une campagne électorale qui nécessite énergie et santé.

NICOLAS SAROZY france2L’ancien Président de la République Nicolas Sarkozy a annoncé le vendredi 19 septembre 2014 sur Facebook qu’il serait candidat à la présidence de l’UMP en novembre prochain. Faisant son grand retour sur la scène politique depuis son échec du 6 mai 2012, Nicolas Sarkozy a été interviewé pendant trois quarts d’heure par le journaliste Laurent Delahousse au journal de 20 heures sur France 2 le dimanche 21 septembre 2014.

Ne pas parler ouvertement et publiquement de la vie politique pendant vingt-huit mois quand on n’a fait que cela pendant trente-cinq à quarante ans, c’était un exploit. Mais comme toutes les victimes d’addiction, on peut toujours rechuter. Il est imaginable à quel point Nicolas Sarkozy s’est retenu de s’exprimer alors que son nom sonnait comme le sésame du rassemblement de la majorité actuelle.

Nicolas Sarkozy, à 59 ans, se retrouvait dans la même position que Lionel Jospin et que Valéry Giscard d’Estaing. Lionel Jospin car, comme lui le 21 avril 2002, Nicolas Sarkozy avait annoncé qu’il quitterait la vie politique s’il était battu. Valéry Giscard d’Estaing aussi, car, comme lui le 10 mai 1981 (VGE n’avait alors que 55 ans), Nicolas Sarkozy a toujours été un animal politique qui a vécu de politique, par passion, et qu’échouer si jeune, interrompre une trajectoire si tôt est particulièrement difficile à admettre. Sans oublier le désir naturel d’une revanche historique.

nicolas sarkozy france 21 septembre 2014Valéry Giscard d’Estaing avait toujours cru en son retour pour les deux élections présidentielles qui ont suivi son échec, en 1988 puis en 1995 (il avait alors 69 ans, l’âge qu’a aujourd’hui Alain Juppé), et avait souhaité prendre le 30 juin 1988 la présidence de l’UDF occupée par Jean Lecanuet, qu’il laissa à François Léotard le 31 mars 1996. Il s’était fait réélire conseiller général dès le 14 mars 1982, puis député le 23 septembre 1984 (il y a exactement trente ans). Il renonça à une nouvelle candidature présidentielle le 12 février 1987 (pour soutenir Raymond Barre) puis le 8 mars 1995 (pour soutenir Jacques Chirac). Il n’a lâché prise que le 2 avril 2004 où il a décidé de siéger (enfin) au Conseil Constitutionnel, après son retrait de l’Assemblée Nationale deux ans plus tôt (le 18 juin 2002) et son échec aux élections régionales en Auvergne (il était le président du Conseil régional sortant jusqu’au 2 avril 2004).

Après avoir imité Lionel Jospin pendant la première moitié du quinquennat de François Hollande, Nicolas Sarkozy a finalement décidé de reprendre les traces de Valéry Giscard d’Estaing en allant dans l’arène, sur le champ des actions partisanes. Cela correspond probablement plus à sa nature que de devenir une sorte de « sage » qu’il aurait eu beaucoup de mal à faire percevoir aux Français.

nicolas sarkozy satisfaitPour revenir ainsi, il lui fallait une nouvelle fois convaincre qu’il avait changé. La question ne dépend évidemment pas de son entourage ni de ses futurs soutiens, mais de l’opinion publique : la mayonnaise prendrait-elle une nouvelle fois ? La question reste en suspens.

La prestation télévisée de l’ancien chef de l’État avait deux buts : d’une part, il lui fallait solder les comptes politiques de 2012 ; d’autre part, il lui fallait convaincre les Français de la nécessité de son retour.

Solder 2012, c’était expliquer qu’il était entièrement responsable de sa défaite électorale (néanmoins en rappelant qu’il avait rattrapé son grand retard pendant la campagne), et reconnaître qu’il avait pu s’être trompé. Réfutant le concept de « ligne Buisson« , il a affirmé qu’il pouvait penser par lui-même.

Il a fait son acte de repentance dans deux domaines qui l’ont particulièrement éloigné de l’opinion publique : sur l’hyperprésidentialisation et sur certaines vulgarités de langage sorties de sa bouche. Il a mis sur le compte de l’impatience à bien faire sa propension à vouloir tout faire, tout diriger. Il a reconnu qu’il aurait dû plus déléguer, plus laisser les autres faire. Il a aussi regretté d’avoir prononcé quelques mots vulgaires qui ne le correspondaient pas, sur le coup de la colère, se déclarant être un homme poli, et disant clairement qu’il ne le referait pas, si c’était à refaire.

Mais il lui fallait aussi expliquer pourquoi il revenait alors qu’il avait dit qu’il ne reviendrait pas. Parce que la situation de la France est catastrophique. Économiquement, certes, mais aussi moralement. Nicolas Sarkozy a entendu la colère des Français et il est déconcerté par le nombre de Français qui ne veulent plus réfléchir de manière rationnelle sur l’avenir de la France et de l’Europe.

L’ancien Président a fait un parallèle entre la situation actuelle et celle de 2008. En 2008, la France a subi une grave crise internationale de la même ampleur qu’en 1929. Tandis que maintenant, le contexte international est complètement différent, plutôt à la croissance et c’est la France qui plombe la croissance européenne. Il a même pris une métaphore écolière en disant que c’était assez fort de café que le mauvaise élève de la classe (la France) demande au premier de la classe (l’Allemagne) d’apprendre un peu moins bien ses leçons pour pouvoir être rattrapé (Manuel Valls est ce lundi 22 septembre 2014 à Berlin pour négocier avec Angela Merkel sur fond de déficit qui n’en finit pas d’exploser).

Tout au long de son entretien, Nicolas Sarkozy a évoqué le manque d’autorité, l’absence de vision de son successeur, en particulier sur l’Ukraine et les relations avec Vladimir Poutine. Il a également évoqué l’UMP elle-même, constatant son manque de leadership et les profondes divisions claniques depuis son départ de l’Élysée. Il souhaiterait donc refonder un parti sur la base de l’UMP qui rassemblerait à la fois les anciens UMP mais aussi les centristes, et même des gens de gauche, des écologistes etc. en insistant sur le fait que le clivage gauche/droite était anachronique (ce en quoi il a raison, dommage qu’il ne l’avait pas perçu avant 2012).

Retrouvant la modération, Nicolas Sarkozy a dit clairement sa volonté que François Hollande finisse son quinquennat jusqu’à son terme, considérant qu’il a été élu pour cinq ans et qu’il fallait défendre les institutions. Il a également refusé de dire s’il reviendrait sur le mariage gay (ce qui serait, il faut bien le remarquer, assez difficile à faire juridiquement).

Nicolas Sarkozy aurait changé mais il n’a pas changé complètement de méthode. Lorsqu’on lui a parlé des affaires judiciaires en cours, il a parlé de ses neurones et dit que s’il avait quelque chose à se reprocher, il n’aurait jamais eu la bêtise de revenir en politique. Mais avec toutes les affaires, les affirmations de mauvaise foi, le mensonge de Jérôme Cahuzac et encore il y a quelques jours, les derniers avatars de la fraude fiscale avec un récent sous-ministre, l’argument ne paraît pas très probant.

Il n’a pas non plus changé quand il a parlé de l’immigration. Il voudrait rassembler vers le centre et la gauche mais il a remarqué quand même qu’il n’était pas allé assez loin sur l’immigration et est revenu sur la nécessité de réformer voire supprimer les Accords de Schengen. Rappelons (ce n’est sûrement pas le journaliste, obsédé par les questions politiciennes, qui aurait pu le rappeler) que le Royaume-Uni n’est pas dans l’Espace de Schengen et qu’il subit de graves problèmes d’immigration (dont la France paie quelques pots cassés puisque, avant d’arriver en Angleterre, ces arrivants passent par le Pas-de-Calais). Schengen n’y est pour rien, d’autant plus que les plus grandes vagues migratoires se font à l’intérieur même de l’Afrique et pas de l’Afrique vers l’Europe.

La réaction à ce retour, en fin de semaine, des principaux leaders UMP, a été double.

Les présidentiables, ils ne sont plus que deux, demeurent plus que jamais dans leur perspective. François Fillon a décidé de rester à coprésider l’UMP jusqu’à l’élection d’un nouveau président et à rester un homme libre ensuite. Alain Juppé a été plus clair. Ayant annoncé dès le 20 août 2014 sa candidature à une primaire ouverte pour la présidentielle de 2017, il a affirmé sur i-Télé/Europe 1/ »Le Monde » le dimanche 21 septembre 2014 qu’il entendait rester candidat, en allant jusqu’au bout : « Je ne suis pas une girouette. Si j’ai dit ça, c’est parce que j’y ai réfléchi, pensé, j’en ai envie et donc, je vais aller jusqu’au bout. Je sais bien qu’aujourd’hui, le match a commencé et que le tacle commence. On essaie de faire croire que je n’irai pas jusqu’au bout. Eh bien, je vais en apporter la démonstration. Vous le verrez en 2016 et 2017 (…). Je le confirme, je l’écris, je le signe. » et en évoquant ainsi Nicolas Sarkozy : « La France a besoin d’apaisement. ». Annonçant qu’il ne briguerait pas de second mandat, Alain Juppé s’est même payé le luxe de publier sur son blog, pendant que Nicolas Sarkozy s’exprimait, son projet d’alternance basé sur quatre points : nouvelle croissance, nouvelle éducation nationale, nouvelle Europe, nouvel élan d’unité nationale (un thème cher à François Bayrou).

Déjà candidats à la présidence de l’UMP, les anciens ministres Hervé Mariton (très impliqué lors du débat sur le mariage gay) et Bruno Le Maire (qui fait une campagne sur le terrain très appréciée) ont affirmé qu’ils ne renonceraient pas à leur candidature malgré celle de Nicolas Sarkozy.

En revanche, la plupart des leaders de la jeune génération ont rejoint finalement la démarche de Nicolas Sarkozy, en particulier François Baroin, Jean-François Copé, Nathalie Kosciosko-Morizet, Laurent Wauquiez, etc.

Le retour de Nicolas Sarkozy réussira-t-il ? La ficelle semble assez grosse, mais pas plus que « l’ennemi, c’est la finance internationale« . Les Français sont en perte de repère. Nicolas Sarkozy a voulu insister sur le fait qu’il serait le seul rempart efficace contre Marine Le Pen dont il a évoqué la responsabilité sur la situation actuelle de la France par son abstention au second tour de l’élection présidentielle de 2012.

Car voici bien le pire cauchemar des socialistes aujourd’hui : que leurs électeurs soient finalement tentés sérieusement de voter, malgré eux, par vote utile, dès le premier tour, pour Nicolas Sarkozy en 2017, pour faire barrage à Marine Le Pen et éviter que celle-ci se retrouve face à un candidat (PS) qu’elle pourrait réellement vaincre.

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