Bruxelles, mes belles

Olivier Ortelpa / Flickr Libération m’a demandé de participer à son city guide. Un article à but touristique, un exercice très différent de mon enquête sur le chaos urbain bruxellois, «Bruxelles, pas belle». Ce «Bruxelles, mes belles» n’a pas suscité autant de commentaires, curieusement 😉 «Bruxelles, ma belle», chantait en 1973 Dick Annegarn, un compositeur néerlandais amoureux de la capitale du royaume. «Bruxelles, pas belle», écrivais-je dans un article publié dans Libération du 15 mai 2013, dans lequel je décrivais par le menu le chaos urbanistique hérité, pour l’essentiel, des années 50-70 et la saleté de la ville. Deux visions opposées, mais en réalité complémentaires: de cette anarchie urbaine, en elle-même digne d’intérêt, émergent de miraculeuses pépites qui ont échappé à la hargne de promoteurs soutenus par un État qui n’a jamais aimé cette ville qui n’appartient ni aux Flamands, ni aux Francophones. Le visiteur doit savoir que Bruxelles ne se laisse pas facilement appréhender: il faut laisser derrière soi ses références quand on passe Quiévrain. Car Bruxelles n’est pas une ville, comme le sont Paris, Berlin, Madrid ou Londres, mais dix-neuf communes indépendantes chapeautées par une région, «Bruxelles Capitale». Un peu comme le futur «Grand Paris». Alors que le reste de la Belgique a réduit drastiquement son nombre de communes, une révolution que l’Hexagone aux 36000 mairies n’est pas près d’oser, les communes bruxelloises tiennent à leur indépendance. Les Français qui débarquent croient toujours qu’Ixelles, Uccle, Jette, Anderlecht ou Schaerbeek (se prononce Skarbèk) sont des quartiers de la ville de Bruxelles. Hé bien non: la ville de Bruxelles se limite (avec quelques excroissances dues à l’Histoire, comme l’avenue Louise qui mène au bois de la Cambre; Laeken, où se trouvent Tour et Taxis, des anciens entrepôts reconvertis en salles d’exposition et de concert; le Parc royal ou encore l’Atomium ainsi qu’une partie du quartier européen) au «Pentagone», entouré par la «petite ceinture», une autoroute à quatre voies en partie souterraine qui l’enserre et la sépare de ses dix-huit sœurs. À Bruxelles, comme dans les dix-huit communes de la région, on trouve un «centre» et une «périphérie», ce qui rend la géographie urbaine difficilement lisible aux yeux d’un étranger. Bruxelles ville, c’est seulement 178.000 habitants sur le 1,2 million que compte la région de Bruxelles capitale (161 km2, contre 105 à Paris). Une région à la fois très riche et très pauvre (20% de chômeurs), une région à forte présence européenne (environ 12%) et immigrée non européenne (environ 30%). Crédit: Nicolas Vigier / Flickr À l’intérieur du Pentagone, c’est là qu’on trouve les incontournables de Bruxelles, de quoi occuper un week-end entier: la Grand-Place, le Mannéken Pis, le lieu le plus visité de Bruxelles, les galeries du roi et de la reine, le Mont des Arts, les Bozar et ses musées, la très belle gare Centrale, la place royale et l’incontournable musée Magritte, le fabuleux palais de justice, aujourd’hui quasi à l’abandon, le palais royal, la place des Sablons et les rues adjacentes, paradis des antiquaires avec la rue Haute, la rue Blaes et la place du jeu de Balle, là où se tient le vieux marché où l’on vend tout le «brol» imaginable – Tintin y trouve l’une des maquettes de la Licorne –, le quartier flamand autour de la rue Antoine Dansaert et du marché Saint Géry, mais aussi la cité administrative (un attentat architectural en pleine rénovation) qui sépare le haut et le bas de la ville, la place de Brouckère (un autre attentat architectural). Mais Bruxelles, c’est aussi les zones pauvres, des Marolles au boulevard de Stalingrad en passant par le quartier du canal. Des quartiers que l’on annonce depuis 30 ans en voie de boboïsation, en vain. Pour comprendre l’histoire y compris urbanistique de la ville et de la région, il faut visiter le Musée de la ville de Bruxelles situé dans la magnifique Maison du roi, sur la Grand-Place. Pour prendre de la hauteur et mieux se rendre compte de l’urbanisme chaotique de la ville, rien ne vaut la très belle vue offerte par le toit du musée de la musique (café), près de la place royale, celle offerte par la place Polaert (devant le palais de Justice) et celle du toit de… l’horrible Parking 58, entre Brouckère et Sainte-Catherine, là où sont organisés régulièrement, durant l’été, des événements, style «les jardins suspendus». Crédit: Luke Ma / FLickr Toujours à Bruxelles ville, mais au bout de l’avenue Louise, près de l’Abbaye de la Cambre (située, elle, à Ixelles), on peut déjeuner ou dîner en haut de l’IT Tower (102 mètres de haut), au restaurant «Villa in the sky», une filiale de la célèbre «la villa Lorraine». À conseiller uniquement si vous avez de gros moyens (compter entre 100€ et 200€ par personne…). Ensuite, on peut partir à l’exploration des autres communes: Ixelles, notamment. Une terre de contrastes coupée en deux par l’avenue Louise qui dépend de la ville de Bruxelles: au nord-est, les très chics étangs de la Cambre, la place Flagey avec l’ancienne maison de la radio -1930- qui accueille aujourd’hui des médias flamands de Bruxelles, une salle de concert, un cinéma, un restaurant et un café branché (le Belga, royaume des bobos); plus au nord, les quartiers africains de Matongue et arabe autour de la rue Malibran, ainsi que la très branchée place Saint-Boniface (avec son café-restaurant emblématique, l’Ultime Atome); au sud-ouest, le quartier français et italien de la place du Chatelain et de la place (très haussmannienne) Brugmann. C’est aussi dans cette commune qu’on trouve plusieurs maisons Horta (en plus, notamment, du Centre belge de la bande dessinée, à Bruxelles ville). À cheval sur les communes de Bruxelles, d’Etterbeek et d’Ixelles, le quartier européen (rue de la Loi, rue Belliard, parc Léopold, place du Luxembourg) vaut le coup d’œil : en pleine rénovation (depuis dix ans), ce quadrilatère a été le lieu de toutes les spéculations délirantes des années 60-70. Un quartier massacré consciencieusement. Les immeubles sans âme de cette époque sont petit à petit rénovés ou détruits et, surtout, des logements sont à nouveau construits, ce qui redonne vie au quartier et redore le blason de l’Europe à Bruxelles. Chaque commune a son identité propre, comme Schaerbeek, où réside le dessinateur François Schuiten, Anderlecht et ses célèbres abattoirs, Koekelberg et sa basilique (pendant architectural du Palais de justice), la bourgeoise Watermael-Boisfort, Auderghem et ses étangs, l’abbaye du Rouge-Cloître, le château de la Solitude, le prieuré de Val Duchesse, Uccle et ses maisons luxueuses du quartier du prince d’Orange, la populaire Saint-Gilles qui a été épargnée par la spéculation… Pour parcourir ces communes, mieux vaut opter pour le vélo (ne pas oublier le casque) ou la voiture. Bruxelles, belle ou pas belle, c’est selon les quartiers, ne laisse en tout cas pas indifférente. Crédit: Jean-Marc Albert / Flickr

ADRESSES

Pour tester les bières belges: Le Délirium café, Impasse de la Fidélité, 1000 Bruxelles. Pour l’apéro: les cafés autour de la place Saint-Géry, 1000 Bruxelles, et la place Saint Boniface, 1050 Bruxelles. Pour déjeuner ou dîner: les restaurants de Bruxelles sont environ 30% plus chers qu’à Paris (et l’eau est forcément en bouteille): compter, pour un établissement correct, entre 35 et 45 euros par personne, vin compris. Et ils ferment tôt. Quelques adresses personnelles : Numéro 7, 7 rue de Washington, 1050 Bruxelles (italien). Le Strofilia, 11 rue du marché aux Porcs, 1000 Bruxelles (grec de grande qualité). La Guinguette en ville, 9 rue du Béguinage, 1000 Bruxelles (français). Le fils de Jules, 35 rue du Page, 1000 Bruxelles (basque). CO2, 36 rue du Page, 1050 Bruxelles (français et belge). Le repos de la Montagne, 39 rue de la Montagne de Saint Job, 1180 Bruxelles (belge). T’Miverstand, 916 chaussées d’Alsemberg, 1180 Bruxelles (français et belge). Un site pour tout savoir sur la ville: visitbrussels.be Un guide: Bruxelles, par Christine Coste et François Schuiten, Lonely Planet, 16 €.
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