« De l’or pour les braves » : tranchées sardoniques

Clint Eastwood et Brian G. Hutton remettent le couvert. Deux années à peine après leur première collaboration sur le tournage de Quand les aigles attaquent, ils prennent le parti de railler et démythifier l’interventionnisme armé, faisant de l’hypocrisie et de l’héroïsme usurpé leur lame de fond, farceuse et persiflante. Sous leur coupe, les soldats américains venus libérer la France du joug nazi ne répondent plus qu’à l’appât du gain, les lingots d’or l’emportant sans décence sur des valeurs morales et humanistes largement battues en brèche. Sourires en coulisse, les militaires mandatés par Washington rivalisent de lâcheté, d’incompétence et d’oisiveté, assignant le cœur et l’esprit à une chasse au trésor plutôt qu’à un quelconque intérêt supérieur, et s’alliant même, au besoin, avec un gradé nazi.

Fresque antimilitariste

L’époque est à l’audace et au panache. Au début des années 1970, Hollywood est traversé par une somme d’influences subversives, au rang desquelles s’inscrivent Sergio Leone, Mike Nichols, Robert Altman, Arthur Penn ou encore Sydney Pollack. De l’or pour les braves leur emboîte le pas, résolu, et s’érige en satire caustique, ridiculisant l’état-major américain à mesure que des mercenaires corrompus et corrupteurs, agglomérés au sein d’une unité réduite, s’enfoncent derrière les lignes ennemies, dans l’ignorance générale. Il ne s’agit plus de transformer une banale ferme en night club de circonstance, mais bien de troquer une rétribution famélique contre un grand frisson rémunérateur, la besogne désolante contre la dérobade clandestine.

Portée par les partitions idoines de Lalo Schifrin, partagée entre duels d’artillerie et humour acerbe, la fresque antimilitariste de Brian G. Hutton dilue dans un drame historique une intrigue invraisemblable de soldats truands, exaltée par les compositions piquées de Clint Eastwood et Donald Sutherland, délicieux en hippie ubuesque tout en fêlures. Une charge retentissante, qui ne saurait trouver meilleur écho qu’à travers ces engins américains largués sur leurs propres troupes, lamentablement déficientes et en jachère.

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