Matteo Renzi: paroles, paroles, paroles?

Pour le président du Conseil italien, la crise que l’Europe traverse est autant politique qu’économique, la logique comptable et austéritaire dans laquelle elle s’est enfermée l’ayant éloignée des peuples : «Si aujourd’hui l’Union faisait un selfie, quel visage verrait-on sur l’écran ? Celui de la fatigue, de la résignation, de l’ennui», a-t-il lancé, mercredi, devant le Parlement européen réuni à Strasbourg. «Il faut retrouver l’âme de l’Europe, le savoir-vivre-ensemble et pas seulement unir nos bureaucraties. Ça, l’Italie s’y connaît et elle n’a pas besoin de l’Europe», a-t-il plaisanté. Cette perte de sens est, selon celui qui n’était «même pas majeur au moment de Maastricht», largement responsable de la percée des europhobes. Et d’appeler les politiques à cesser «l’eurobashing» : «On a gagné [nos élections] en ne disant pas que nos problèmes viennent de l’Europe, mais de l’Italie elle-même.»

Ce sens de la formule fait évidemment mouche après les dix ans de présence de José Manuel Durão Barroso à la tête de la Commission et l’eurotiédeur de la plupart des dirigeants européens. «Il ne faut pas surestimer son discours : en Italie, il y a une tradition fédéraliste affirmée qui a été occultée par vingt ans de Berlusconi. Giorgio Napolitano, le président de la République, ou son prédécesseur, Enrico Letta, ne disent pas autre chose», tempère Sylvie Goulard, députée européenne (Modem, libérale) et fine connaisseuse de l’Italie. Même s’il insiste sur la nécessité de sortir du tout-économique, Renzi n’oublie nullement le sujet : sans diminution du chômage, il sera impossible de «réenchanter le rêve européen».

Il demande donc, tout comme le chef de l’Etat français, une «réorientation» de l’Union, afin qu’elle rompe avec les politiques austéritaires mises en place sous la pression allemande, pour répondre à la crise de la zone euro. Mais à la différence de François Hollande, son budget est à l’équilibre, ce qui lui donne des marges de manœuvre dont la France est privée. Le problème italien, c’est la dette (plus de 2 000 milliards d’euros) qui ne pourra pas être réduite sans une croissance forte. D’où ses appels à desserrer les cordons du Pacte de stabilité.

Mais, là aussi, Renzi n’a pas été très clair sur ce qu’il voulait. Après avoir semblé demander une réécriture du Pacte afin d’exclure les investissements du calcul du déficit public, il a rétropédalé lorsqu’il a pris conscience de l’opposition allemande : «Nous ne voulons absolument pas changer les règles du Pacte de stabilité», a-t-il proclamé mercredi à Strasbourg, mais utiliser toutes les marges de flexibilité qu’il permet. Cependant, Rome n’abandonne pas l’idée de se donner de l’air par un autre moyen, par exemple en créant une dette européenne (via l’émission d’eurobonds), destinée à financer des investissements, une idée qui fait figure d’épouvantail à Berlin et que Renzi s’est bien gardé de défendre à Strasbourg.

Au final, le principal mérite du jeune Premier ministre italien est de redonner du souffle au débat européen. Car, concrètement, pour l’instant, il n’a rien obtenu. Enfin, pas tout à fait : il a réussi à placer ses proches aux postes clés. Il a ainsi décroché la présidence du groupe socialiste du Parlement européen pour Gianni Pittella, ainsi que la présidence de la très importante commission des affaires économiques et monétaires. De même, il cherche à obtenir le ministère des Affaires étrangères de l’Union pour sa propre chef de la diplomatie, Federica Mogherini. Une politique de placement qui fait aussi partie du retour de l’Italie sur la scène européenne.

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