Xavier Bertrand est l’un des rares hommes politiques qui semble avoir tiré les conclusions du score du FN.
On connaît L’Étrange Défaite. Cet ouvrage écrit par Marc Bloch témoigne de la défaite de 1940 et cherche à comprendre les raisons d’un tel effondrement, moral et militaire. A l’inverse, aux lendemains d’une élection régionale sans vainqueurs ni vaincus, on ne peut être que saisi par l’étrange bilan dressé par la classe politique et l’exécutif en particulier.
La poussée de fièvre passée, il ne faudrait rien changer. Demain le vent du boulet ne sera plus qu’un lointain souvenir. Tel un cancer, il suffirait de s’habituer à vivre avec, de le contenir artificiellement. Point de remaniement donc et c’est logique puisque l’exécutif, plutôt satisfait des résultats, entend ne pas changer de cap ni même l’infléchir légèrement.
Si Tancrède, l’un des héros du film de Luciano Visconti Le Guépard, estime dans le contexte de la révolution Italienne qu’il faut que tout change pour que rien ne change, François Hollande juge lui qu’il ne faut rien changer, quitte à ce que cela conduise à tout changer.
Il n’y a bien que Xavier Bertrand pour non seulement poser les bonnes questions et les responsabilités mais aussi prendre des décisions symboliques telles que l’abandon de certains mandats.
A défaut de fond idéologique et d’un projet de société, l’exécutif croit avoir trouvé dans le combat contre le FN la martingale qui lui permettra de décrocher son ticket pour le deuxième tour des présidentielles de 2017. Étrange choix qui consiste à combattre l’incendie en arrosant les flammes plutôt que le foyer. Et pour cause. Ce serait prendre le risque de se mouiller les pieds. La stratégie qui consisterait à s’interroger sur la position du curseur, un peu plus ou un peu moins à gauche, n’est pas meilleure.
La gauche doit s’interroger sur son grand écart entre les discours et les actes, sur ses pratiques dans l’exercice du pouvoir local ou national, sur l’éthique et la morale dont elle se gargarise mais sur lesquelles elle s’assoit à longueur de journée.
Avec les défaites successives aux municipales, aux départementales et aux régionales, le PS premier parti de gauche est en train de perdre le maillage territorial qui faisait sa force. La plus grande menace pour lui, c’est de devenir un parti hors sol, coupé de la réalité de ses concitoyens. A droite la situation n’est guère meilleure avec une balkanisation des forces en présence. Dans ce contexte peu réjouissant marqué par un pourrissement avancé des partis traditionnels, la seule bonne nouvelle finalement est de nature agronomique. C’est que parfois d’un tel substrat surgissent les plus belles fleurs.
Crédit photo : NC — La Manufacture.